André 3000, géniale moitié d’Outkast pour les impies, a signé deux solides apparitions sur les nouveaux albums de James Blake et Anderson .Paak. Le moyen de faire un petit retour sur sa morne carrière après sa séparation avec Big Boi.
Andre Benjamin de son vrai nom n’est pas le genre d’artiste expansif, il distille ses apparitions médiatiques avec grande parcimonie et n’a pas trop fait parler de lui depuis les années fastes du groupe. Pourtant, c’est le papa de ce qu’on a connu de mieux chez Outkast et il est responsable de quelques tubes indispensables des années 2000, dont l’incroyable « Millionaire » avec Kelis.
« À chaque fois que des artistes me sollicitent, je suis là pour les aider. Je le fais plus pour eux que pour moi-même. Je n’éprouve pas beaucoup de bonheur à faire de la musique comme ça. Je trouve le bonheur en faisant plaisir à ceux avec qui je travaille, en les aidant et en les voyant être excités. »
Depuis 2003, c’est quasi-chou blanc. On a entendu son flow inimitable sur le « Channel Orange » de Frank Ocean, sur « Take Care » de Drake aussi et plus récemment en accompagnement du retour des autres légendes des 00s N.E.R.D., mais pas bien plus à se mettre sous la dent. Des apparitions en pointillé chez des potes, c’est ce qu’il indiquait aimer faire dans une interview donnée à Complex en 2017 (ci-contre).
En toile de fond de ses apparitions dans les médias, on retrouve ce sentiment d’être largué par ce qui se passe actuellement dans la musique, le rap en particulier. Celui d’avoir fait son temps. « C’est comme regarder danser son oncle« , dit-il dans une autre interview donnée à GQ la même année.
« Rapper, c’est comme être un boxeur. Peu importe votre niveau, plus vous vieillissez, plus vous ralentissez – peu importe qui vous êtes. »
L’année dernière il sortait de son relatif mutisme (une ou deux apparitions sur un couplet d’un pote) avec un 2-titres expérimental et jazzy en l’honneur de ses parents décédés. Le premier en son nom. Il revient cette année sur deux projets de gros noms du game, deux amis à lui : James Blake et Anderson .Paak.
Sa première participation à 2019 se trouve sur le dernier album de James Blake, « Assume Form ». Il apparaît sur un couplet de « Where’s the Catch », où il distille à partir de 1:23 son flow démentiel sur une boucle de piano. Histoire de rappeler qu’il envoie encore de sacrées patates pour un boxeur de 43 ans à la retraite.
Quoi de plus logique de le retrouver plus tard sur le « Ventura » d’Anderson .Paak, avec qui il partage un sens du groove et un goût prononcé pour le jazz. Sur ce « Come Home » détendu du gland, il rappe à partir de 3:01 avec sa facilité déconcertante à enchaîner les mots à un rythme dont il a seul le secret. Si on ajoute cette petite boucle de guitare toute conne et la batterie qui lui déroule un tapis, on tient une apparition de grande volée.
De là à penser que le bougre en a encore suffisamment sous la semelle pour nous lâcher un album solo qu’on attend depuis trop longtemps, il n’y a qu’un pas que je franchis en grand écart. Mais vu comme notre artiste tourmenté évoque cette possibilité dans la même interview de GQ, on a du mal à y croire.
« Si je mourrais maintenant, il n’y a qu’une seule chose que je regretterais : cet album que je voulais faire. Je voulais créer mon propre projet. Les choses sur lesquelles j’ai bossé. Mais pour ma propre satisfaction, tu comprends. »
Et pour la nôtre, putain, André. Chiche ?